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Article publié dans le webzine de Décembre 2014

Manoir Hovey : de l’évolution de la villégiature


Il fut un temps où les riches et célèbres passaient leurs étés dans de grandes maisons. Aujourd’hui elles profitent aux citadins qui viennent s’y ressourcer le temps d’une fin de semaine…

Membre de la prestigieuse famille des Relais & Châteaux qui fête ses 60 ans cette année, ce manoir n’a ni tourelles, ni chemins de ronde, ni pont-levis. Son allure rappelle plutôt celle des grandes maisons du Sud, voire même celle de George Washington, à Mount Vernon.

En ce temps-là, au début du XXe siècle, les riches familles fuyaient la moiteur et les miasmes des villes pour se réfugier à la campagne pendant l’été. L’âge d’or du capitalisme a ainsi vu naître les belles stations de villégiature où les grandes demeures poussaient comme des champignons, notamment à Newport, dans les Berkshires et … à North Hatley!

North Hatley a eu la faveur de Henry Atkinson, propriétaire de la Georgia Power d’Atlanta. Encore bouleversé par l’issue de la Guerre de Sécession, ce Sudiste boudait la Nouvelle-Angleterre. On raconte même que dans le train (privé) qui l’emmenait vers les rives du lac Massawippi, il fermait les stores pour ne pas voir le pays des Yankees.

De 1900 à la fin des années 1940, la famille Atkinson a passé ses étés à North Hatley, pratiquant le golf, la voile et le tennis à l’ombre du manoir avec d’autres estivants américains et les Loyalistes qui avaient fui la « révolution » américaine.

Autre temps, autres mœurs, la maison devient auberge dans les années cinquante, permettant à plus de vacanciers de profiter de ces lieux magnifiques. En 1979, l’auberge change de mains et se positionne résolument sur le créneau du luxe avec ses 5 étoiles. Le temps des longs étés à la campagne est bien révolu : le séjour moyen est maintenant de deux nuits. Formant 50% de la clientèle, les Québécois ont peu à peu remplacé les Américains. Et la clientèle internationale, longtemps marginale, a cru de 1% par année ces derniers temps.

Alors qu’au début du XXe siècle, les séjours à la campagne faisaient partie d’un rite immuable qu’on renouvelait chaque année sans y penser, les nuitées au Manoir Hovey se réservent de plus à la dernière minute. « Il y a 10 ans, tout notre été était réservé dès le mois de mai», explique le concierge de l’établissement Marc-André Blais. « Aujourd’hui, les clients ont tendance à choisir leurs dates de vacances, et donc d’effectuer leurs réservations, à la dernière minute. »

Côté gastronomie, les clients sont plus curieux. « Il est loin le temps où la carte ne comprenait que des plats classiques comme le canard à l’orange et le bœuf bourguignon », souligne Roland Ménard, chef du restaurant Le Hatley depuis une trentaine d’années. » Maintenant, le menu de ce qu’il qualifie de « cuisine québécoise contemporaine » est plus varié et change sans cesse.

Proches de la terre, visiblement adeptes du « slow food » et du mouvement «farm to table », ambassadeurs du terroir, Roland Ménard et son second, Francis Wolf sont intéressés par les produits locaux et s’approvisionnent auprès d’une trentaine de producteurs de viandes, fruits et légumes du coin. Ils ont dû les sensibiliser aux besoins d’un restaurant et ont établi avec eux un calendrier d’arrivages. Ils organisent avec leur équipe des visites de producteurs en basse-saison et sensibilisent également le personnel des cuisines à la récolte des herbes sauvages et des champignons omniprésents sur les terres du Manoir.

Les principales demandes adressées au concierge de l’établissement sont d’ailleurs des indications pour « faire » la route des fromages, des vins etc. et des recommandations pour rencontrer des producteurs locaux. « Par contre, les clients ont de plus en plus de restrictions alimentaires », souligne Marc-André Blais, « ce qui est un défi relativement facile à relever quand on utilise des produits de qualité dont on connaît la provenance et des techniques culinaires où n’interviennent que peu d’irritants possibles ».

Si les clients d’aujourd’hui aiment se retrouver dans la nature en amoureux, ils apprécient quand même l’accès à la wifi, ce que n’aurait sans doute pas dédaigné Henry Atkinson quand il passait de longues semaines loin de ses affaires….

www.manoirhovey.com

Louise Gaboury