Quand les nuages noirs s’accumulaient à l’horizon économique et politique de la Grèce, le temps demeurait au beau fixe pour le tourisme. Blanches et bleues, les Cyclades brillaient au soleil. Leurs plages, hôtels, restos et boutiques ne désemplissaient pas, alimentés par le va-et-vient incessant des traversiers.
Quand on s’embarque pour une île, Martha’s Vineyard, Lipari ou une autre, il y a toujours une ambiance festive, avec cette foule colorée, impatiente de laisser le continent derrière elle. Cette fois-ci, ce sera Mykonos, puis Santorini et Naxos, parmi la cinquantaine d’îles que compte l’archipel des Cyclades.
Mykonos, malgré tout
Si sa réputation de repaire de la jet set internationale attire les foules, elle fait fuir plusieurs voyageurs moins épicuriens qui auraient tort de bouder leur plaisir. D’abord, il y a Chora, la capitale de l’île, incontournable, toute blanche et pimpante, avec ses anciennes maisons de marins, ses légendaires moulins, ses terrasses et ses boutiques chic. Malgré ses plages disco peuplées de « bioutiful people » éternellement jeunes, cette île n’est pas que m’as-tu-vu. À preuve, en son centre, se trouve une oasis de paix, Ano Mera, avec sa petite place et le monastère Tourliani, à des années-lumière de la foule déchaînée.
Mykonos est également le port d’embarquement pour l’île de Delos, lieu de naissance d’Apollon et d’Artemis. Cette toute petite île, considérée dans l’Antiquité comme le centre des Cyclades, est devenue un musée à ciel ouvert. La guide, Maria, qui a une allure on ne peut plus grecque, mais parle français comme une Parisienne, explique que c’est le site archéologique le plus étendu de la Grèce antique, vestige d’une ville portuaire très importante, doublée d’un lieu de culte pan hellénique. L’île a été très peuplée. On parle de 25 000 habitants venant de tout le bassin méditerranéen « Cette ville organisée sur un seul endroit témoigne admirablement de la vie de tous les jours. Ce qui en fait toutefois un site unique, c’est qu’il était interdit d’y naître et d’y mourir. Les femmes enceintes sur le point d’accoucher et les gens qui sentaient la mort venir devaient se réfugier sur une île voisine. » L’île, qui était sans défense, parce que sacrée, est tombée sous le règne de Mithridate. Après avoir été désertée pendant près de 20 siècles, elle a été fouillée par l’école française d’Athènes avant d’être inscrite sur la Liste du Patrimoine mondial de l’Unesco.
Cap sur Santorini
Cette île volcanique unique est chaque jour de l’été piétinée par les passagers des bateaux de croisières déposés ici et repris là, à l’autre bout du village de Fira, dont la rue principale a été surnommée Gold street à cause de l’abondance de bijouteries. Rien de trop typique…
À Oia, la rue commerciale est peut-être moins « dorée », mais elle est plus chic. C’est dans ce coin qu’est célébrée la cérémonie sacrée du coucher du soleil. Le spectacle peut aussi être admiré de l’un ou l’autre des catamarans qui se spécialisent dans cette activité et servent un repas à bord.
Ce qui est moins connu du paysage de Santorini, c’est le site d’Akrotiri, une ville préhistorique de l’âge du bronze probablement abandonnée peu longtemps avant d’être ensevelie par l’éruption volcanique de 1650 av JC. La ville ancienne a été redécouverte par hasard, Ferdinand de Lesseps y ayant trouvé le type de terre volcanique qu’il recherchait pour la construction du canal de Suez. Le site, récemment réaménagé est d’une incroyable richesse.
Sous le charme de Naxos
La tranquille arrivée à Naxos tranche sur la frénésie de Mykonos et Santorin. Ce petit port tout calme, dominé par l’imposante silhouette de Portare, le temple d’Apollon (lieu de rencontre pour admirer le coucher de soleil), dévoile ensuite des terrasses ombragées, et derrière, un lacis de ruelles qui mènent à l’étonnant Musée vénitien logé dans une maison fortifiée datant du XIIIe siècle. L’héritier de la famille franco-vénitienne Della Rocca-Barozzi, d’une faconde extraordinaire, organise des concerts en soirée.
Il y a beaucoup à voir sur la plus grande île des Cyclades qu’il faut pourtant déguster par petites bouchées. Des chapelles byzantines, aux villages de Damalas, Moni et Apiranthos, où on peut encore croiser un paysan monté sur un âne, dans ces ruelles pratiquement impraticables en voiture. Le temple de Demeter, qui rappelle le passé alors que le présent nous appelle sur de superbes plages, parmi les plus belles des Cyclades. Il faut y rester suffisamment longtemps ett surtout prendre le temps de savourer la magie du lieu et la gentillesse des habitants.
Et la crise?
Le tourisme ne connaît pas la crise. Le touriste, lui, espère en profiter.
On dit qu’il y a eu moins d’Allemands, à cause de leur position sur la crise grecque, mais ils ont été remplacés par d’autres visiteurs. Beaucoup de Québécois s’y sont rendus cette année. Sur la plage d’Elia, en ce matin d’octobre, on aurait pu se croire à Old Orchard ou à Hollywood…
Les Grecs se plaignent du retard des traversiers, expliquant qu’ils sont moins nombreux et plus lents pour des questions d’économie de carburant. Les visiteurs ont peu de points de comparaison et attendent docilement.
Les paiements par carte de credit sont acceptés, mais les petits commerçants préfèrent être payés en argent comptant, puisque la restriction des retraits est maintenue à 420 euros par semaine.
Par contre, ça devient plus gênant de marchander quand la vendeuse nous parle de ses difficultés financières...
En vrac
Transport : En saison, Air Transat propose des vols directs au départ de Montréal
Hébergement
À Mykonos
. Membre de Small Leading Hotels of the World, l’hôtel Royal Mykonian est conçu comme un petit village typique de l’île. Si la décoration des chambres est plutôt simple, celle des espaces publiques est délirante. (www.royalmyconian.gr/). Encore plus de luxe? Le Mykonian Ambassador, membre de la prestigieuse famille des Relais & Châteaux (www.myconianambassador.gr)
À Santorini
L’hôtel Majestic, un complexe touristique (www.hotel-majestic.gr/), Plus chic, le Canaves Oia propose des hébergements d’une vertigineuse élégance (www.canaves.com/)
À Naxos, Le complexe Naxos Collection dispose de suites et de cottages lumineux dans un cadre architectural typique des Cyclades. Idéal pour les familles.www.naxiancollection.com/
Manger grec
La cuisine grecque
La Grèce peut compter sur une kyrielle de produits de qualité pour concocter les meilleurs repas. Quoique le plus souvent simple, sa cuisine peut être qualifiée de créative et équilibrée.
D’abord, le fabuleux et authentique yogourt grec, l’huile d’olive, puis, les légumes, aubergines, tomate, concombres, les câpres, les poissons et fruits de mer, l’agneau, les fromages de mouton, de chèvre et de vache, les herbes aromatiques, le miel, et le vin, bien sûr.
À Mykonos, il faut goûter le kopanisti, fromage local qu’on mange notamment dans un plat baptisé mostra, sorte de bruschetta où on met aussi des tomates, de la menthe et de l’huile d’olive.
Santorini est connue pour ses vignobles, où le cépage Assyrtiko est en vedette, mais on y fait aussi du visanto. On y cuisine la fava, l’aubergine blanche, et les meilleures tomates cerises.
Naxos, l’île agricole, produit notamment du fromage (l’arsenico!), et de l’huile d’olive, en plus d’une belle variété de légumes, dont une pomme de terre particulièrement goûteuse qui jouit d’une IGP (indication géographique protégée). On y fabrique également du Kitron, une liqueur de cédrat qui rappelle un peu le Limoncello.
Souvenirs
À rapporter dans ses bagages, du vin ou de l’alcool, de l’huile d’olive, des sels aromatisés (www.nostimosalt.com), de la céramique, des bijoux créés par Diana Brechtken (www.oniraglika.com), des livres (sur la mythologie grecque, en français, pourquoi pas?) à acheter à la très belle librairie Atlantis Books, à Oia (www.atlantisbooks.org).