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Article publié dans le webzine de Juillet 2015

Venise autrement: le pari de mieux connaître Venise


Venise en mode « slowtravel », c’est la découverte de coins secrets et la rencontre des Vénitiens, après avoir « coché »  la basilique Saint-Marc, le palais des Doges, le pont des soupirs et celui du Rialto et le tour de gondole…

Je n’avais que 10 jours et ma fascination pour cette ville. Ce n’est pas beaucoup. C’était ma septième visite. Je n’y avais jamais passé plus de 72 heures à la fois. Cette année, ce serait différent. D’abord, je serais seule, ce qui m’était déjà arrivé, et que j’avais aimé. Pas de compromis, pas de hauts cris si j’avais envie de traverser la ville pour goûter le gelato de Nico ou les cichetti d’all’Arco. Ensuite, je n’aurais que quelques trucs au programme, de quoi me laisser porter par la ville…

Deux ou trois choses que j’ai apprises…

Même au début d’avril, il y a du monde à Venise. Il y a des embouteillages piétonniers dans les ruelles qui mènent à San Marco, sur le Ponte de la paglia, celui d’où on prend le Pont des soupirs en photos, en face de la basilique San Marco et du Palais des doges, et même dans les belles salles supposément intimes du très chic et cher café Florian…

Il y a des Vénitiens à Venise. Et pas que des vieux. Il faut voir le campo Santa Margherita envahi par les familles et les enfants avec leur trottinette ou leur vélo après l’école et les fins de semaine, et les bacari du Dorsoduro se remplir d’étudiants à la fin de la journée, ou encore après la collation des grades qui a lieu en avril dans le cadre somptueux de la piazza San Marco…

Les Vénitiens que j’ai rencontrés adorent leur ville. Ils l’ont choisie. Comme Gabrielle, Française, mais Vénitienne d’adoption et de passion depuis près de 30 ans, ou pris mari et pays comme Donatella, de Trieste, mais Vénitienne par alliance depuis 35 ans. Ou y sont nés comme Benedetta, revenue après sept ans passés à Londres, Pietro, heureux de travailler à Venise où il est né et où il a étudié, comme Martina, ou Alain, à demi Français, mais Vénitien de naissance. Ils vivent à Castello, San Marco, ou au Lido, et ont chacun leur lot de bonnes adresses pour l’aperitivo et les cichetti.

Ils disent découvrir encore des coins nouveaux lors des promenades qu’ils font volontiers dans cette ville qui les charme toujours. Ils trouvent facilement leur chemin dans le lacis de ruelles, saluent leurs connaissances au passage,  indiquent un bar sympa au détour d’un campo, et ont appris à éviter San Marco et le Rialto dans leurs déplacements quotidiens. La ville, l’autre Venise, leur appartient.

Le touriste s’est arrêté à San Marco et au Rialto…

Mon ambition était d’apprivoiser la Venise des Vénitiens, le plus loin possible de la foule déchaînée. Je voulais me promener dans chacun des six sestieri (quartiers) pour sentir leur pouls, découvrir la géométrie variable de leurs campi, et me laisser séduire encore et encore par la ville, ses canaux, ses façades décrépites, ses espaces verts (eh oui!). En fait, j’ai manqué de discipline pour découvrir aussi systématiquement Venise, qui se prête plutôt aux errances.

À quelques minutes de la zone surfréquentée de la piazza San Marco, j’ai redécouvert un sestiere méconnu, Castello où on peut voir les Vénitiens pêcher le dimanche, converser avec leurs voisins en revenant de faire leurs courses. Au bout de la via Garibaldi, qui change deux fois de nom avant d’arriver à l’isola di  San Pietro, on arrive à l’église di San Pietro di Castello qui a été la cathédrale de Venise avant San Marco. J’ai aimé sa façade inspirée par Palladio, mais aussi son cloître attenant, déserté par les communautés religieuses et maintenant habité par de simples Vénitiens.

J’ai pris le temps de flâner dans les Giardini pubblici, où, près des serres se trouve un café fort sympathique où je m’étais promis de revenir pour l’apéritif, mais bon… La prochaine fois!

En quittant la piazzale Roma, j’ai tourné le dos à la circulation des voitures et des autobus pour pénétrer dans le calme quartier Santa Croce. En me perdant (si peu!), je me suis retrouvée sans trop m’en rendre compte dans San Polo, jusqu’au moment où j’ai rejoint les environs trop fréquentés du Rialto pour fuir en mettant le cap sur le Dorsoduro.

Les îles de la lagune

Au-delà des sestieri, plus ou moins battus, de Venise, il y a les nombreuses îles de la lagune. Si quelques-unes sont très prisées par les touristes, notamment Murano et Burano, il en reste de plus secrètes. J’ai aimé San Michele, l’île-cimetière située en face de Fontamenta Nova, où sont enterrés notamment Diaghilev et Stravinsky, et l’aura particulière de San Francesco del Deserto, de San Lazzaro degli Armeni, et de Torcello, avec  son émouvante égise au bout du chemin.

L’île de Sant’Erasmo, à 30 minutes de Fondamenta Nova, mais à des années-lumière de San Marco, est depuis l’époque des Doges le potager de Venise. Avec ses vues sur la lagune, par delà ses champs cultivés, j’ai reconnu l’île qui m’avait intriguée dans le film Impardonnables avec André Dussolier et Carole Bouquet. J’ai pu me promener à vélo, visiter des producteurs du fameux artichaut violet d’appellation contrôlée, manger  dans un petit restaurant bien approvisionné en produits frais, et goûté un excellent vin blanc, l’Orto di Venezia, produit sur place par un Français passionné.

Finalement, j’ai tenu ma résolution d’un certain Jour de l’an il y a quelques années, de mieux connaître Venise, mais il me reste encore tellement à découvrir ! Et Venise sera encore là l’année prochaine et l’année d’après. Malgré la cession de quelques îles à l’hôtellerie de luxe, malgré l’acqua alta, malgré la corruption autour de MOSE, sensé sauver la ville. Et malgré les affres du tourisme de masse…

Pratico-pratique

. Logement

Domus Ciliota, un ancien couvent qui propose un hébergement simple, voire spartiate. Très bon rapport qualité/prix. Pas de folies à faire quand on passe 10 jours à Venise…( www.ciliota.it/). Voir d'autres possibilités pour loger à Venise.

. Belles tables

Bien manger coûte cher, mais ce n’est pas une raison pour se priver de goûter les spécialités vénitiennes traditionnelles bien faites, ou de nouvelles façons d’apprêter les produits typiques de la Vénétie. J’ai savouré les premiers chez Wildner (www.hotelwildner.com), adepte du « slowfood », (bravo pour les « moeche », petits crabes disponibles seulement pendant quelques jours au printemps et en automne, et seulement à Venise qu’on mange entiers légèrement frits) et les seconds, chez son voisin Do leoni (l’étonnant mais délicieux tartare de loup de mer « mojito » et le très léger « fritto misto »), le restaurant du seul Relais & Châteaux vénitien, le Londra Palace, deux oasis établies presque côte à côte dans la zone pourtant extrêmement touristique de la Riva degli Schiavoni (www.londrapalace.com/fr/restaurant-do-leoni).

Dans les îles, j’ai mangé les produits de la mer au Gato nero, à Burano (pâtes aux palourdes) et à Il latto azurro  (la castraura, premier petit artichaut du plan et de la saison, qui pousse sur cette île, Sant’Erasmo) gattonero.com/ et www.latoazzurro.it/.

. Aperitivo

Quand on ne veut pas trop dépenser, on opte plutôt pour les bacari qui proposent tramezzini (sandwiches pas de croûte) et cichetti (tapas vénitiens) qu’on grignote accompagnés d’un Prosecco, ou d’une ombra, verre de vin rouge ou blanc maison. J’ai glané auprès des Vénitiens que j’ai rencontrés, leurs bonnes adresses :  Taverna al Remer, Cava Tappi, All’Arco, Timon, Bacaro da Fiore.  Certains d’entre eux préfèrent les environs du pont du Rialto, d’autres la Fondamenta delle Misericordia, maison en trouve un peu partout en ville…

. Visites

Les passages secrets du Palais des Doges organisée par Walks of Italy, (j’ai adoré les autres visites que j’ai faites avec eux à Rome l’année dernière) (walkofitaly.com).

Sur le thème des cichetti, au cours de laquelle on glane quelques informations sur la ville, notamment sur le ghetto, où la visite commence (monicacesarato.com).

Le casino Venier où est logé l’Alliance française (afvenezia.it).

La Fenice (teatrolafenice.it)

La Collection Peggy Guggenheim (guggenheim-venice.it)

Le Palazzo Grassi et la Punta della dogana : les expositions sont parfois hermétiques, mais ces deux bâtiments superbement restaurés sont à voir (palazzograssi.it), comme le Palazzo Grimani rouvert à la visite il y a quelques années (palazzogrimani.org)

 

Louise Gaboury